Homélies

Homélie 5ème dimanche du Carême année A 2023

Nous ne savons pas si les choses se sont passées telles qu’elles sont relatées dans l’évangile d’aujourd’hui. Le récit de la mort de Lazare n’est pas à prendre au premier degré seulement. En effet, il est plein de symboles. Le premier symbole est celui de la mort, image de toutes les forces du mal qui s’opposent aux forces de vie, prônées par Jésus. Lazare, lui, est notre image à nous tous, confrontés aux forces du mal. La réaction de Marthe et Marie, les deux sœurs de Lazare, est comme la nôtre. Cette réaction est provoquée par la dure loi de la séparation, de l’absence, de la déstabilisation et de la peur de l’avenir. Les deux sœurs réagissent à cet événement, chacune avec leur foi et leur sensibilité. Marthe croit fermement que son frère ressuscitera à la fin des temps. Ce qui ne change rien à la triste situation. Marie se tait ; elle se relie à Jésus et sait qu’il partage sa peine et sa souffrance. Jésus lui-même ne s’en cache pas : Il est ému et touché par cette séparation d’avec son ami. Ceci nous montre bien le côté humain de Jésus, même si par après sa nature et sa mission divines ressortiront et donneront à cet évènement une tout autre dimension. Celle qui va lui permettre d’ouvrir de nouveaux espaces de vie et de manifester jusqu’où va la maîtrise de Dieu sur la vie et la mort.

Au-delà de la mort physique, il existe d’autres morts, sociale, morale, psychique et spirituelle, qui écrasent l’humain et le privent de sa liberté et de sa joie de vivre. Jésus, par sa réaction étonnante et même choquante, veut amener ses amis et leur entourage à prendre conscience de la victoire et de la puissance qu’il possède sur la mort. Avec lui, la mort n’est plus une fin sans issue, elle fait partie de la vie et devient une étape de l’existence et un passage dans la vie de l’au-delà. Les forces de mort n’arrivent plus à écraser l’humain ni à avoir le dernier mot. Celui-ci se trouve du côté de Jésus et de son père qui possèdent cette puissance et cette maîtrise.

Que ce temps de carême nous aide à prendre conscience de toutes ces morts qui nous privent de la joie de vivre, qui nous paralysent et nous enferment dans les tombeaux de nos égoïsmes, de nos préjugés et critiques négatives, de nos manques de confiance en nous-mêmes et dans les autres. Celles qui nous divisent et nous plongent dans les ténèbres, dans la haine ou la vengeance et qui nous enchainent dans la morosité de nos vies et dans celles de ceux et celles qui nous entourent. Le geste de Jésus vis-à-vis de Lazare est celui qu’il réalise avec chacun et chacune d’entre nous, en ouvrant la voie vers la victoire de la vie sur toutes les morts. Jésus, par la victoire de sa résurrection, vient aussi ouvrir nos tombeaux et nous délier de nos chaînes de mort pour nous rendre libres et participants de cette victoire.

Nous commençons, nous aussi, à ressusciter lorsque nous suivons Jésus dans notre vie de tous les jours. La vie éternelle commence dès maintenant, dans notre façon de vivre et d’aimer à la suite de Jésus. Le plus profond désir de Jésus est de nous partager cette vie éternelle. À sa suite et à l’exemple de Marthe et de sa sœur Marie, nous sommes ainsi invités à professer notre foi. Non pas une foi basée sur les opinions ou les idées, mais une foi en la personne de Jésus, présent en nous, au cœur de notre vie. Wenceslas Mungimur Saint-Laurent/Virton

Homélie du 4ème dimanche de Carême année A.

Méditation à partir de l’évangile de l’aveugle de naissance.

Dans l’évangile de ce dimanche, il est question de la guérison d’un aveugle de naissance, un jour de sabbat. Trois attitudes sont à mettre en parallèle : celle de Jésus envers la personne aveugle, celle de l’aveugle lui-même et celle des pharisiens et des scribes, ‘’docteurs de la loi’’,.
D’abord, nous constatons que Jésus prend l’initiative en l’abordant le premier. Pour le guérir, Jésus utilise un geste simple : il prend de la boue qu’il mélange avec sa salive, avant de la lui appliquer sur les yeux. Comment faut-il entendre ce geste de Jésus ?
Jésus utilise de la boue, matière naturelle, mais pas très indiquée pour guérir la cécité. Il montre qu’il n’y a pas de trucage dans son geste.
Mais il ajoute de sa salive, ce qui change la donne. Son geste est symbolique. Il utilise de la terre pour guérir l’homme de sa cécité physique, mais sa salive en fait un mélange miracle qui guérit l’aveugle de son aveuglement spirituel.
Le chemin du ciel passe par la terre et ouvre les yeux sur une autre réalité.
C’est là toute la symbolique de son geste.

Un second constat, c’est l’évolution du cheminement de l’aveugle, une fois guéri, dans son discernement par rapport à Jésus. Il parle d’abord de ‘’l’homme qu’on appelle Jésus’’, qui lui a ouvert les yeux et envers qui il est reconnaissant, pour en arriver aux termes de « Christ, fils de Dieu », qui a suscité en lui la foi.
Cette foi qui s’installe en lui, grâce à l’espace créé par une guérison intérieure qui va au-delà de son rétablissement physique.  Cette guérison intérieure lui ouvre la voie d’une vraie rencontre avec Jésus-Sauveur et Fils de Dieu. Par Jésus il découvre un Dieu de tendresse et d’amour. Un Dieu de lumière qui désormais va l’éclairer et le guider. Illuminé par cette lumière intérieure et habité par cette présence, il reçoit la force de témoigner en devenant à son tour une lumière qui éclaire les autres.

Malheureusement, sa lumière, comme celle de Jésus d’ailleurs, n’est pas perçue ni reconnue par les pharisiens et les scribes. Pour eux, la préoccupation première, c’est l’observance stricte de la loi. Pour l’application de celle-ci, ils passent leur temps à surveiller les personnes qui la respectent et celles qui ne la respectent pas. Ils ont oublié que le sabbat a été fait pour l’homme ; pour lui donner le temps de se reposer et de se consacrer à son Dieu. Malheureusement, les docteurs de la loi en ont fait un fardeau pour leurs semblables, un prétexte pour asseoir leur hégémonie et asservir les autres.

Ils prétendent savoir, mais ils ne savent pas, connaître mais ils ne connaissent pas, voir mais ils ne voient pas. Ils sont ignorants, avec toutes les conséquences négatives qu’entraîne cette ignorance qui les aveugle. Ils sont tellement imbus d’eux-mêmes qu’ils ne voient pas en Jésus celui qui donne à la loi tout son sens et sa signification. Jésus dénonce une pareille attitude de leur part, ce qui va les énerver, parce qu’ils se sentent ébranlés dans leur autoritarisme, leur sectarisme et leurs fausses certitudes. Aveuglés aussi les disciples, les parents de l’aveugle, la foule qui l’entoure…   

L’aveugle, lui, fait un autre chemin et une autre découverte. Il est naturel, innocent et tellement dans le besoin qu’il ne peut que jubiler, être dans l’action de grâce. C’est lui qui désormais voit clair. Ainsi devient-il témoin qui éclaire, qui guide vers ce Jésus Sauveur qui lui a redonné toute sa dignité humaine et lui a ouvert les yeux de la foi.

Et nous ? Où en sommes-nous ? Sur quoi se basent notre foi, nos pratiques, notre sabbat ? Quel est notre cheminement à nous ? Est-il le fruit d’une rencontre libératrice avec le Sauveur, une rencontre qui fait de nous des témoins authentiques? Sommes-nous des lumières sur le chemin des autres ou sommes-nous un assemblage de traditions héritées du passé ?  Sommes-nous un amalgame de règles et coutumes avec leur stricte observance, accompagnée d’un sentiment de culpabilité et de peur? Si c’est le cas, ne sommes-nous pas atteints par une certaine cécité ou une certaine surdité par rapport à la façon nouvelle d’interpréter la loi prônée par Jésus ?

Puisse ce temps de carême être pour nous ce temps de guérison intérieure et de renouvellement de notre regard et de notre écoute de la Parole de Dieu. ? Il nous appelle à quitter toutes nos interprétations purement formalistes de la loi, de la doctrine, pour rejoindre le comportement et la vérité de Jésus en faisant route avec lui vers sa pâque, qui est aussi la nôtre. 
Wenceslas Mungimur
Saint- Laurent/Virton

Homélie 3ème dimanche de Carême Année A

3è dimanche de carême A 2023 : Homélie

Dimanche passé, nous méditions sur l’expérience faite par les disciples Pierre, Jacques et Jean, de la présence de Dieu, de son éclat, transfigurant Jésus en présence de Moïse et d’Élie. Ils faisaient ainsi une rencontre avec Dieu, qu’ils ne voulaient plus quitter, tellement c’était merveilleux, porteur et séduisant. Seulement il fallait qu’ils comprennent le vrai sens de cette révélation. Qu’ils comprennent aussi la parole et le message de Dieu concernant Jésus et écoutent ce qu’il leur dit. Il n’était pas question qu’ils restent sur la montagne, mais qu’ils redescendent dans la vallée et continuent à assumer leur quotidien comme cadeau de ce vrai Dieu.

Aujourd’hui, Jésus, dans le récit de la Samaritaine au bord d’un puits, révèle cette présence de Dieu qui doit avant tout être rencontré en esprit et en vérité. Il le révèle à une femme qu’on pourrait qualifier d’errante et à un endroit plein de symboles et de signification. Le premier symbole, c’est celui de cette femme qui arrive seule, dans le temps de midi, aux heures de repos, pour puiser l’eau. Pourquoi seule et pourquoi à cette heure presqu’incognito ? Portait-elle le poids de sa vie ? Était-elle prisonnière des traditions de sa culture ? Ou encore se sentait-elle indigne d’être avec des gens, de peur d’être pointée du doigt ou d’être regardée de travers ? Je me permets de me poser de telles questions, parce que, plus loin dans la rencontre avec Jésus, il est dit que cette femme menait une vie hors des normes de sa société, de sa culture. Jésus ose lui dire qu’elle n’a jamais eu de mari, alors qu’elle a connu cinq hommes dans sa vie et vit avec un sixième. La femme elle-même ose dire qu’elle n’a pas de mari. Pourquoi s’exprime-t-elle ainsi ? Ne se sent-elle pas en ordre ? Porte-t-elle, pour cette raison, un poids en elle ?

Un autre symbole, c’est le fait que Jésus se trouve dans un territoire ennemi par rapport à ses origines juives. Il se trouve du côté des Samaritains, qui ne s’entendent pas avec les juifs. Et il parle à une femme, une Samaritaine. Pourquoi fait-il cela ? Pourquoi ose-t-il braver ainsi les interdis ? La Samaritaine, elle-même, est surprise. « Comment ! Toi qui es juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? » Les disciples sont, eux aussi, étonnés de voir leur maître causer avec une femme, contrairement à leurs traditions. « …Ils étaient surpris de le voir parler avec une femme. »

Jésus révèle le vrai Dieu qui est au-delà de toutes les barrières, au-delà du poids des traditions, au-delà des barrières érigées par des volontés humaines. Au-delà des exclusions qui existent entre son peuple et les Samaritains. Il est le Dieu de tous, présent en chacun de ses enfants, qu’il soit juif ou samaritain. Il est d’un amour total et inconditionnel vis-à-vis de chacun et chacune. Jésus comprend que la femme qui est devant lui a besoin de rencontrer ce vrai Dieu. Elle a besoin d’être libérée de tout le poids qu’elle porte en elle. Il entame un dialogue de confiance avec elle. Il donne à la femme de se connaître vraiment, mais aussi de le connaître, lui, Jésus, comme le Messie, le fils de Dieu. Et elle entraîne avec elle tout le village.

Ce Dieu qui libère, comme il l’a fait avec le peuple d’Israël en Egypte, même si celui-ci peine à le reconnaître et à lui faire confiance. Ce Dieu dont témoigne Saint Paul pour dire que nous sommes en paix avec lui, parce qu’il n’est là que pour nous sauver. Ce Dieu, nous avons, nous aussi, à le rencontrer pour être libérés de tous les poids que nous trainons dans nos vies, nos traditions, nos pratiques. La recette, c’est Lui-même, par son Esprit, qui nous la donnera.

Cette recette, c’est en priorité de nous sentir librement aimés par lui et librement d’aimer les autres d’un amour vrai et authentique. La recette, c’est aussi comprendre que tout endroit, toute personne, est le lieu, le temple de sa présence.

2ème dimanche de Carême année A

Dans notre marche spirituelle vers Pâques, par la voie de la conversion, du partage et de la prière, nous avons compris qu’il fallait vivre avec Jésus une expérience du désert pour être mis face à nous-mêmes, aux autres et à Dieu. Aujourd’hui, notre marche continue : une marche de confiance qui nous demande de tout quitter et de partir avec Dieu vers l’inconnu,. Comment est-ce possible ? Comment oser faire confiance à quelqu’un que l’on ne connaît pas bien ? Comment oser tout quitter pour aller vers l’inconnu ? Il s’agit là d’un mystère et seule la foi, issue d’une rencontre personnelle avec Dieu, peut essayer d’apporter une réponse. Ce mystère, cette aventure sont pourtant vécus par beaucoup de croyants. Des croyants d’hier comme d’aujourd’hui.

Le témoignage d’Abraham, dans la première lecture de ce dimanche, est interpellant ! À la demande du Seigneur son Dieu, il exprime une totale confiance et quitte tout. Le récit dit : « Abram (le nom qu’il avait avant de rencontrer le Seigneur) s’en alla, comme le Seigneur le lui avait dit. » Et pourtant, cet Abram-là n’était pas gâté par la vie et avait tout pour douter de ce Dieu et lui opposer une résistance Il est âgé et sans descendance. Sa femme, elle aussi au crépuscule de la vie, dont il est dit qu’elle était stérile. Cette situation pouvait faire naître chez eux un sentiment de révolte ou d’aigreur, quand on connaît la manière dont on considérait leur condition dans leur culture et l’opprobre public engendré par le fait de ne pas avoir de descendance. Mais non ! Abram ose un oui qui va le transformer et changer le cours de sa vie, individuelle, familiale et sociale. Un OUI qui lui ouvrira les portes des bénédictions de son Dieu, pour lui et toute sa descendance ; et également pour ses compatriotes.

Il fallait ainsi oser pour comprendre qu’au-delà de l’impression négative que l’on peut avoir de soi-même, de son entourage, des autres et de Dieu, il y a du positif, des bénédictions, de la lumière qui nous attendent. C’est le conseil que Paul donne à son disciple Timothée, qui va être confronté à des résistances par rapport à l’annonce de l’Évangile. « Prends ta part des souffrances liées à l’annonce de l’Évangile. Car Dieu nous a sauvés, il nous a appelés à une vocation sainte, non pas à cause de nos propres actes, mais à cause de son projet à lui et de sa grâce. » Autrement dit, tiens bon : tu es dans le bon !

C’est également ce que Jésus vit avec ses disciples, en particulier Pierre, Jacques et Jean, sur la montagne de la transfiguration. Les trois ont des ambitions autres que celles de Dieu, une autre conception de Dieu, de Jésus, de sa mission et de celle qui les attend. Ils feront, eux aussi, une rencontre qui va les bouleverser et les transformer. Par Jésus, ils font l’expérience d’un Dieu autre que celui qu’ils prétendent connaître, à la hauteur de leurs certitudes et de leurs ambitions humaines. Ils font l’expérience d’un Jésus Sauveur, un Fils de Dieu, lumière qui donne sens à leur vie, les éclaire, les libère et les sauve.

Dire ‘oui’ à Jésus et dire ‘oui’ à son projet d’amour, c’est être appelé à partager sa gloire, c’est, comme Abraham, donner accès à une source intarissable de bénédictions. Mais c’est aussi savoir que notre marche vers Dieu, vers Pâques, pourra être parsemée d’embûches, de morts apparentes ; mais au bout se trouve la victoire, la résurrection. Il nous faut oser la foi, oser la confiance. Des facilités, comme celles que Pierre souhaite dans son extase devant la transfiguration, comme nos intuitions sur des certitudes que nous voulons imposer aux autres, ne sont pas toujours de nature à nous faire grandir sur ce chemin vers lequel nous engage le Christ. Il nous faut une vraie rencontre avec ce Dieu de Jésus, nous laisser éclairer par sa lumière pour mieux comprendre le respect, l’amour qu’il a vis-à-vis de tout humain ici sur terre. Ainsi nous éviterons tout comportement méprisant ou d’intolérance vis-à-vis de nos frères et sœurs migrants et réfugiés chez nous, au nom parfois d’un certain Dieu ou de certaines racines chrétiennes.

Homélie du 1er dimanche de Carême année A

Le récit mythique d’Adam et Eve nous renvoie à une réalité qui s’adresse à l’humanité de tous les temps. Autrement dit, il nous concerne encore aujourd’hui. Adam et Eve ont reçu du Créateur la possibilité de vivre dans un jardin d’Eden, un paradis de vie dans lequel ils pouvaient goûter à tous les arbres, à l’exception d’un seul, l’arbre du bien et du mal. Qu’est-ce que cela peut signifier ?

Dieu leur a tout donné, la vie, son amour, tout le bonheur dont ils avaient besoin, représenté par le jardin d’Eden. Mais il leur a aussi donné une liberté. C’est en raison de cette liberté et de ce pouvoir de décision individuelle qu’ils ont cédé au soupçon à l’intérieur d’eux-mêmes, qui laissait supposer que Dieu ne leur avait pas tout donné, de peur que leurs yeux ne s’ouvrent et qu’ils deviennent comme Lui. C’est cela qu’ils espéraient obtenir grâce à leur liberté. C’est cela la rencontre d’Eve avec le serpent, comparé à Satan, appelé aussi diviseur. Le serpent, défini et reconnu comme une créature méchante, contenant des venins mortels à l’endroit des enfants de Dieu, comme lors de la traversée du désert par les Hébreux. Eve a cru tout ce que lui a dit le serpent, jusqu’ à entrainer Adam dans sa chute.

Cette liberté, qui leur a fait croire qu’ils pouvaient devenir les égaux de Dieu, avec la connaissance du bien et du mal, leur a fait perdre ce merveilleux paradis offert, cette innocence originelle. Leurs yeux s’ouvrirent alors, non pour devenir les égaux de Dieu, mais pour se rendre compte de leurs limites et de la responsabilité qui désormais était la leur devant leur destinée et leurs actes. Ils quittaient ainsi le chemin d’une vie donnée gratuitement pour un choix à faire entre le bien et le mal. C’est ainsi qu’ils quittent le paradis pour le désert, un lieu de combat, d’épreuves, de survie et de mort… Le serpent leur a fait croire que le paradis n’en était pas un…Selon lui (le diable), Dieu les aurait trompés de peur qu’ils ne deviennent ses égaux et que le vrai paradis était celui qu’ils devaient acquérir en bravant l’interdit. Mais ils finirent par comprendre que finalement ce paradis promis par le serpent n’était qu’une tromperie. Au contraire, c’était plutôt un désert, lieu de dureté, de nudité et de durs combats pour la survie…

C’est vers ce désert, ce combat avec Satan, que Jésus est envoyé par l’Esprit, alors que Dieu vient de le confirmer officiellement comme son Fils bien aimé. C’est à ce moment-là que Jésus commence son combat avec Satan, qui lui propose la triple tentation d’en profiter, avec des facilités alléchantes, la gloire et le pouvoir. Une occasion en or pour le Christ de devenir l’égal ou de prendre la place de son Père. Mais, contrairement à l’ambition d’Adam et Eve, Jésus choisit de se mettre du côté de son Père et opte pour la victoire du bien. Il transforme son combat au désert en une victoire et une confiance dans l’amour de son Père.

Ce n’est pas par hasard que ces textes nous sont proposés en ce premier dimanche de carême. Le carême est un temps de désert, une occasion de faire l’expérience du désert. C’est là que chacune et chacun de nous est appelé à prendre la mesure de ses limites, en regroupant ses forces pour assurer sa survie. On oublie l’accessoire, le superflu, le superficiel pour s’attacher aux vraies valeurs. Faire carême, c’est se convertir, se retourner, distinguer ce qui est insignifiant. C’est remettre les choses à leur place, leur rendre leur vraie valeur, reconsidérer nos choix de vie.

Comme nous dit St Paul, puissions-nous durant ces 40 jours réapprendre à discerner l’essentiel, à ne pas vouloir tout, à ouvrir des chemins de vie pour nous et pour nos proches. C’est d’ailleurs ainsi que nous ferons déjà dans notre vie quotidienne l’expérience de la résurrection. Pour le croyant, chaque jour est Pâques, parce qu’il prend conscience que tout ne lui est pas dû, mais que tout lui est donné par l’Amour du Créateur, notre Père.

Homélie du Mercredi des Cendres 2023 Année A

Mercredi des cendres A 2023 / Homélie.

Le carême est une marche spirituelle vers Pâques. Une marche à la fois de conversion, de partage et de prière.

Pour ce qui est de la conversion, il s’agit d’un chemin qui nous invite à une rencontre en profondeur avec Dieu, une rencontre dans laquelle nous sommes appelés à nous tourner vers Dieu et par laquelle aussi nous acceptons nos limites, nos fragilités et nos péchés. Mais c’est également une occasion qui permet la découverte de l’immense richesse de la miséricorde divine.

Loin de nous lancer dans de spectaculaires mortifications et dans des sentiments de culpabilité excessive, il s’agit simplement d’entrer dans une rencontre de vérité pour des retrouvailles dans la joie. Une rencontre qui donne davantage soif de pénétrer dans la profondeur de l’intimité et qui, comme Marie à l’Annonciation, nous pousse à l’ouverture et au partage.

Le partage, lui, relève du témoignage crédible de cette rencontre. Témoignage que nous devons donner, non seulement dans nos paroles, mais surtout à travers nos actes.

Tout ce que nous recevons est appelé à se propager, à se partager. Ce que nous vivons dans nos eucharisties, toutes les bonnes paroles que nous prononçons, tous les beaux qualificatifs que nous nous attribuons, doivent se traduire dans le concret de notre vie de tous les jours. Les messages de l’Evangile qui dénoncent les injustices, la misère, l’écrasement des uns par les autres doivent nous indigner et nous pousser à agir, et parfois à élever le ton. Ils ne doivent pas rester lettre morte ni renfermés dans nos églises, nos prières ou nos recueillements personnels. Non seulement, il faut vivre ces paroles évangéliques, mais surtout en donner l’exemple entre nous, afin que ceux qui nous observent puissent s’en émerveiller et être interpellés. Et c’est dans une vie de prière et d’intimité avec Dieu, où nous puisons à la source, que nous nous ancrons pour ensuite partager ce message.

La prière, elle, nous invite à entrer dans un double mouvement de dialogue et d’écoute dans le silence. Elle nous permet d’entrer dans une attitude de confiance par rapport à quelqu’un qui est là, présent, comme la source de toute notre vie. Une telle prière n’a pas besoin de démonstrations extérieures, mais elle se vit simplement en esprit et en vérité.

Le temps de carême nous permet de revisiter ces différentes dimensions de notre foi et de les vivre de manière authentique pour que notre marche vers Pâques soit un renouvellement positif de notre regard sur nous-mêmes, sur les autres et sur Dieu. Alors notre comportement et notre regard nous permettront de rectifier nos attitudes déplacées ou mauvaises et de nous émerveiller de la beauté de la création. Wenceslas Mungimur St-Laurent/ Virton.

Homélie 7ème dimanche Temps Ordinaire année A

Le message de Jésus, dans l’évangile de ce dimanche, est une fois de plus déroutant et difficile à accepter. « Aimez vos ennemis, dit-il, et priez pour ceux qui vous persécutent. » Comment est-ce possible, humainement parlant ? Nous sommes conscients que des ennemis, dont le comportement est contraire à l’amour du prochain et à l’amour de Dieu, ont toujours existé et existeront toujours. C’est nous qui le sommes vis-à-vis d’autres ou d’autres vis-à-vis de nous. Mais les ennemis sont autant à l’extérieur de nous qu’à l’intérieur. Ils sont générés par l’égoïsme des humains, leur arrogance, leur volonté de puissance, leur orgueil, leur jalousie, leur convoitise, leur méchanceté, etc. Quand nous parlons des humains, il s’agit des humains que nous sommes, en commençant par nous-mêmes. Humainement parlant, la réalité et la logique des choses sont celles-là. Les nier serait manquer de réalisme ou fermer les yeux sur ce que nous sommes en réalité et ce que représente notre entourage.

En parlant de l’amour de nos ennemis, Jésus nous rappelle cette réalité humaine. Personne n’est à l’abri. C’est pour cette raison qu’il demande de ne pas juger ni condamner. « Qu’as-tu, dira-il ailleurs dans l’Évangile, à regarder la paille qui est dans l’œil de ton voisin, toi qui ne vois pas la poutre qui est dans le tien ? » Il sait que s’il est difficile de reconnaître son propre comportement et ses propres ennemis intérieurs, il est plus facile de pointer du doigt ses ennemis extérieurs que sont les autres.

Pour lui, la solution consiste à nous tourner vers Dieu et à nous inspirer de son exemple. Lui qui n’est qu’amour aime chacun de ses enfants d’un même amour, sans exclusion ni jugement ni mépris. « Dieu fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes », nous dira encore Jésus. Si nous baignons dans l’intimité de Dieu, nous pourrons franchir le pas en ce qui concerne l’amour des ennemis, parce que nous comprendrons que chaque humain est un enfant de Dieu. Nous pourrons le regarder, l’approcher, avec un regard et un cœur hérités de Dieu lui-même. Cette intimité ne peut venir que d’une rencontre personnelle, profonde et transfigurée avec Dieu lui-même. Ce qui aidera à mieux faire le discernement vis-à-vis de nous-mêmes et des autres.

Nous ne sommes pas parfaits ni saints. Mais nous pouvons tendre vers les vertus de foi, d’espérance et d’amour. C’est pourquoi la question de l’amour de nos ennemis ne peut être audible, accessible et possible pour nous que dans la mesure où nous regardons davantage vers Dieu que vers nous-mêmes ou nos proches ou encore nos ennemis. En nous tournant vers Dieu, nous retrouverons non seulement notre propre dignité et notre respect, mais aussi celui de nos ennemis. Nous comprendrons qu’ils sont enfants de Dieu au même titre que nous et que si nous détestons le mal en eux comme en nous-mêmes, nous sommes tous appelés à nous aimer et aimer notre prochain, comme nous-mêmes. Wenceslas Mungimur St-Laurent/Virton

Homélie 6ème dimanche du Temps ordinaire année A

Dans notre monde de plus en plus codifié, avec une certaine dictature de l’apparence, une implosion d’images, de bonnes paroles, de beaux discours…, Jésus nous propose aujourd’hui une autre voie, une autre façon de voir la réalité. Celle d’une parole vraie, d’une pensée authentique, d’un regard sincère…, qui jaillit d’un cœur honnête et droit. Des qualités, comme nous l’avons entendu le dimanche dernier, qui transforment notre vie et notre comportement pour devenir des lumières et du sel auprès de ceux qui nous voient ou vivent avec nous. Des qualités qui donneront à nos’ oui’ et nos ‘non’ tout le poids de leur valeur et de leur respect. « Que votre oui soit oui et que votre non soit non », nous dira-t-il !

Né dans une société et une culture avec des règles pour s’organiser et se développer, Jésus ne veut pas abolir ces règles et ces lois, mais il veut que celles-ci respectent l’humain parce qu’elles sont au service de l’homme et non le contraire. Jésus met en garde contre une certaine utilisation purement formaliste qui viendrait à enfreindre la liberté et la dignité humaine. Des bonnes paroles, toute application extérieure, de façade ou hypocrite de la loi ne valent rien, lorsqu’elles sont en contradiction avec la vérité du cœur. Le chemin pour y arriver, c’est celui de la Sagesse, de la lumière de Dieu. Celles-ci non seulement nous introduisent dans l’intimité et la vérité de Dieu, mais elles nous permettent de vivre dans un bon discernement profond de nos paroles, nos actes et de notre comportement dans notre relation avec les autres. Elles feront que notre regard extérieur et celui de notre cœur soient en plein accord, et pour ce que nos lèvres prononcent soient ce que pensent nos cœurs.

Bref, que tout mon être soit dans la transparence lorsque je porte un jugement, quand j’apprécie, que je promets, que je m’engage dans une relation, quand je regarde et m’émerveille. Pour Jésus, il s’agit d’un chemin d’amour. Celui-ci nous ouvre la voie à la vérité par rapport à nous-mêmes, quand nous sommes dans le bon comme dans le mauvais, nous montrant, par exemple, l’importance de la conversion, du pardon, du désintéressement à cultiver, d’une valeur ou d’une personne à apprécier… Tout ceci relève de la Sagesse de Dieu, mais aussi du choix de l’amour, de la vie et de code de bonne conduite dans la relation et dans nos engagements respectifs.

Je termine par cette prière de Pierre CHARLAND, pour Prions en Église Canada, intitulé : ‘Sous le soleil de ton regard : « Seigneur, je veux vivre au grand jour sous le soleil de ton regard. Abreuve-moi de vérité et soutiens-moi de ta grâce. Tu connais mes actions et tu vois le fond de mon cœur. Garde-moi de la convoitise, de l’orgueil et du mensonge. Que mes paroles soient franches et mes gestes droits. J’aspire à des relations et à des amitiés sincères. Préserve-moi de l’hypocrisie et de la tromperie. Je veux goûter à la liberté de ceux qui n’ont rien à cacher. Quand je tombe, Seigneur, aide-moi à me relever, car tu es douceur et miséricorde. Apprends-moi à t’aimer vraiment et à aimer les autres, sans cachettes, ni fausseté ! » (Prions en Église, Février 2017, p.84) Wenceslas Mungimur Saint Laurent -Virton

Homélie du 5ème dimanche du Temps Ordinaire année A

Dans le livre d’Isaïe, le peuple revient d’une longue période d’exil. En son absence, tout a été dévasté, pillé, ruiné dans le pays. Il ne reste que des ruines et des cendres. La situation est précaire: les cultures sont dévastées, le bétail décimé et même à Jérusalem, le temple est complètement détruit. Le peuple se lamente et se culpabilise ; s’il a connu une telle détresse, se dit-il, c’est à cause de ses péchés. Les gens vont donc essayer de s’attirer les bonnes grâces de Yahvé et obtenir son pardon en effectuant toutes sortes de rites de purification, de jeûnes et autres sacrifices.

Mais ils ont beau multiplier les prières et les invocations, Dieu semble insensible et ne pas entendre leurs appels, il ne manifeste rien. C’est pourquoi le prophète les interpelle en leur disant qu’il n’y a rien d’étonnant au fait que leurs prières, leurs liturgies, tous les rites ne trouvent aucun écho auprès du Seigneur. Sans les oublier ni les négliger pour autant, le prophète veut leur dire que ce que le Seigneur attend d’eux, c’est de rester sensibles au malheureux sans abri, à celui qui est sans vêtement. Et surtout, à ne pas se dérober à son prochain dans la peine !

Le prophète sent la dérive et veut alerter le peuple. Ce n’est pas un retour strict à des pratiques religieuses externes et formalistes (reconstruction du Temple, restauration du sabbat et des fêtes, restauration des jeûnes) qui compensera l’injustice sociale en train de se recréer. Cette inégalité ne fait qu’augmenter le scandale et l’hypocrisie. Mais il s’agit d’un changement en profondeur, grâce à l’écoute et la mise en pratique de la Parole de Dieu. « Partage, dit-il, ton pain avec celui qui a faim, recueille chez toi le malheureux sans abri, ne te dérobe pas à ton semblable, alors ta lumière jaillira comme l’aurore et tes forces reviendront rapidement ».

Pour saint Paul, s’agissant de ce retour à la Parole de Dieu, au Christ, même si c’est difficile à recevoir rationnellement, il se refuse à garder ses auditeurs dans une illusion creuse. Tout en se reconnaissant faible, craintif et tremblant, il se dit poussé par sa responsabilité d’apôtre et reconnaît que ce ne sont pas ses propres moyens, mais la force de l’Esprit qui le pousse et agit en lui.

Quand on se laisse habiter et guider par l’Esprit, on trouve cette vocation première dont Jésus nous parle dans l’évangile. « Vous êtes le sel de la terre…Vous êtes la lumière du monde. » Être sel de la terre, c’est avant tout retrouver sa propre saveur qui donne goût à sa vie et à la vie des autres, en les aidant à retrouver leur propre saveur dans leur vie familiale et sociale. La saveur de la vie, c’est se savoir utile, important, précieux et découvrir que l’on compte pour les autres…C’est aussi se savoir aimé, se sentir capable de grands efforts, parce que l’on sait que les autres ont besoin de nous et comptent sur nous. Wenceslas Mungimur Saint-Laurent/Virton

Homélie 4ème dimanche du Temps Ordinaire année A

Je me souviens d’un exemple cité par l’abbé René ROUSCHOP dans son commentaire sur les textes de ce 4è dimanche ordinaire. Il parle d’une petite histoire racontée par un célèbre rabbin à propos de son petit-fils qui, rentrant à la maison, était en pleurs parce que, maugréait-il, son frère aîné ne l’avait pas cherché, alors qu’il jouait au jeu de cache-cache. Son plaisir consistait à se voir recherché ou trouvé, pendant qu’il se cachait. Mais quel ne fut pas son désespoir lorsqu’il ne reçut aucun signe dans ce sens-là de la part de son frère. Un fait banal, mais qui peut aussi nous concerner et nous interpeller !

En effet, c’est un peu comme cela dans la relation avec Dieu. Il est vrai que le bonheur de l’homme, c’est de savoir qu’il est cherché et attendu par Dieu, comme celui de Dieu est aussi de savoir qu’il est cherché par l’homme. Comme le dit la première lecture, le livre de Sophonie, Dieu se laisse toucher et s’appuie sur ceux qui le cherchent en toute justice et humilité. Ceux aussi qui, ne pouvant simplement pas s’appuyer sur des moyens humains, s’en remettent à Dieu et mettent en lui toute leur confiance. Ainsi, Dieu pourra les introduire dans son intimité, les éclairer afin qu’ils vivent dans la justice et la vérité et trouvent en Dieu repos et sécurité.

Ces personnes font partie de ceux que saint Paul qualifie de ‘petit reste’ dans la deuxième lecture d’aujourd’hui lorsqu’il parle des petites gens qui se sont laissé enthousiasmer par la Bonne Nouvelle de l’Évangile et qui ont compris que l’argent, la science et le pouvoir sont nécessaires, mais ne peuvent pas les sauver ni être l’unique source de leur bonheur. Ils mettent toute leur confiance en Dieu, sachant que c’est Lui seul qui peut les préserver et les rendre heureux. Ils n’ont pas à s’enorgueillir ni à se sentir inutiles ou impuissants : C’est en Dieu qu’ils trouvent toute leur force. Comme dit encore saint Paul, Dieu choisit ce qu’il y a de plus faible pour confondre les plus forts. Ce sont ceux qui vivent les béatitudes proclamées par Jésus dans l’évangile : les pauvres de cœur, qui ont de l’importance pour Dieu et pour leurs frères et sœurs. Ils ne sont nullement épargnés par les aléas, les épreuves de la vie, mais ils savent que cela n’est pas le mot de la fin. Ils sont aussi, jour après jour, les témoins de la victoire de l’amour fou de Dieu vis-à-vis de ceux et celles qui doutent et qui cherchent, les exclus de la vie, les marginaux, les exilés, les lépreux. Ils communiquent le bonheur qu’ils trouvent en Dieu.

En cette journée mondiale de la lèpre, il nous vient à l’esprit le beau témoignage du père Damien auprès des pauvres et des lépreux de Molokai. Ces autres aussi qui ont pour nom: Mère Teresa de Calcutta, Sœur Emmanuelle, l’abbé Pierre, Marguerite Barankitsé du Burundi, le docteur Dénis Mukwege. Ou encore des parents, des catéchistes qui éveillent les jeunes à la foi, bref tous ceux et celles qui se dévouent au service de leurs frères et sœurs.

Ce bonheur de communiquer avec les autres, c’est à notre tour d’en assurer le relais, avec ceux et celles qui nous entourent. En cette journée consacrée à la lèpre, le Christ a besoin de nous. Il nous envoie vers celles et ceux qui souffrent encore de cette maladie horrible, mais il nous demande aussi d’aller auprès de « lépreux » d’aujourd’hui ; toutes ces personnes qui souffrent physiquement ou moralement, pour être une présence aidante à leurs côtés. Il nous mandate également pour transmettre la lumière de son Évangile à nos contemporains et en particulier à tous les blessés de la vie.

Lectures du jour et du dimanche

Pour les lectures du jour et les lectures du dimanche, vous pouvez vous reporter au site suivant : www.aelf.org

 

A lire et relire

3ème dimanche de l’Avent année A, 11 décembre 2022

Avec son message radical sur la société de son époque, surtout vis-à-vis des responsables politiques et religieux, Jean-Baptiste s’est attiré beaucoup d’ennuis et d’ennemis. Il a même osé toucher au Roi Hérode, à qui il reproche de s’être uni avec Hérodiade, la veuve de son frère. Il en paie les conséquences : il est arrêté par Hérode et emprisonné. De sa prison, il s’interroge sur celui qu’il a vu dans la foule des candidats au baptême et qu’il a reconnu et présenté aux gens comme l’Agneau de Dieu. Il en entend parler de sa prison et envoie ses disciples auprès de Jésus pour vérifier s’il est bien Celui qui doit venir ou d’un autre. Pourquoi se pose-t-il de telles questions ? Hésite-t-il, doute-t-il ? Et ses disciples, ainsi que tous ceux qui accouraient vers lui et le prenaient même pour le Messie, que pensent-ils ? Quelle considération peuvent-ils encore avoir pour Jean-Baptiste ?

On peut dire que Jean-Baptiste lui-même vit un tournant par lequel il est appelé à changer la vision de sa mission. C’est une approche distincte qui s’ouvre à lui. Une période différente de celle pendant laquelle il annonçait la venue du Messie en demandant de s’y préparer. Il est maintenant amené à le reconnaître présent parmi eux. Pourtant il devrait savoir que rien n’a changé par rapport à sa vocation, même s’il est remis en question, arrêté et emprisonné. Le Messie est bien là. Il est à l’œuvre et il s’agit bel et bien de celui dont il a annoncé la venue. Comme réponse, Jésus renvoie ses disciples lui dire ce qu’ils voient et observent : les actes et les signes prodigieux qu’il accomplit. Comme Jean-Baptiste lui-même n’a pas douté de sa mission, il est bel et bien le précurseur, un grand prophète, comme en témoigne Jésus. Toutefois il doit reconnaître et accepter sa réalité et ses fragilités humaines et s’en remettre à la divinité et à la supériorité de Celui qui vient après lui. Lui, le plus petit, qui, comme il le dit, n’est que le précurseur qui annonce la venue du Messie et n’est pas digne de dénouer ses sandales.

Jésus invite son précurseur à entrer dans cette logique, celle de Dieu, et à changer son regard sur les réalités nouvelles. Un regard intérieur, profond, pour reconnaître et contempler les merveilles de Dieu. Un autre regard qui lui permette de comprendre combien Dieu ne veut que le bonheur de l’homme et combat toutes les formes de misère. Il ne veut pas le malheur de ses enfants, représentés ici par les aveugles, les sourds, les boiteux, les lépreux, les pauvres, les morts. Dieu en prend tout particulièrement soin, parce que derrière ces fragilités se cache la mort qui combat la vie. Or le Fils est venu pour apporter et célébrer la victoire de la vie sur la mort.

À nous aussi, il est demandé, en ce temps de l’Avent, de changer notre regard en profondeur, c’est-à-dire de nous convertir pour reconnaître le Messie parmi nous, ainsi que toutes les merveilles qui témoignent de sa présence. Peu importe notre situation, nos grandeurs, nos gloires, nos faiblesses ou toutes les épreuves par lesquelles nous passons, qui nous font douter de cette présence dans notre monde, nous avons toutes et tous besoin d’un changement de regard pour nous convaincre de sa présence, de son amour et de sa force afin de garder en nous l’espérance et la foi en sa Parole.

1er dimanche de l’Avent : homélie

Le temps de l’Avent est un temps de rappel et d’appel. Tous les messages contenus dans les lectures appellent à la vigilance : se tenir prêt et rester éveillé. « Tenez-vous donc prêts, vous aussi, nous dit Jésus dans l’évangile de ce dimanche. C’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. » Ce rappel et cet appel résonnent au cœur de notre vie, telle que nous la vivons au jour le jour.

Quand nous la regardons de près, nous constatons qu’elle ressemble à une course sans fin. Nous sommes pris dans un tourbillon d’obligations, de contraintes, de responsabilités… Nous y sommes un peu comme des robots, emprisonnés dans un système dont nous avons du mal à nous défaire. Un rythme de vie qui creuse des écarts entre les humains que nous sommes et accentue des individualismes et des isolements. Ces derniers amènent souvent des comportements contraires à des relations de qualité, d’amitié, de solidarité et de fraternité. Une étude a révélé que le nombre de suicides était plus élevé pendant des périodes comme celles des fêtes de Noël et de fin d’année

Oui, une vie comme celle-là ne peut que nous épuiser et nous étourdir jusqu’à oublier notre vocation première, celle de filles et de fils bien aimés du Seigneur. Dans la lecture de ce jour, le verbe « veiller » nous rappelle que nous ne sommes pas seuls, que nous n’avons pas seulement cette vie concrète. Nous avons une autre vie, celle que nous propose notre Sauveur venu dans notre humanité et toujours présent parmi nous. Veiller : c’est ouvrir nos yeux à la foi pour discerner les signes de cette autre vie et de cette présence du Seigneur parmi nous. Veiller : c’est toujours être prêt à lui ouvrir les portes de notre cœur dès qu’il frappe. Concrètement, veiller, c’est vivre et pratiquer au jour le jour le double commandement de l’amour, tel que Jésus le rappelle. Veiller : c’est enfin garder sans cesse en nous cette mémoire du Seigneur à travers toutes nos paroles et tous nos actes.

Ouvrons nos yeux à la foi pour voir dans chaque geste, chaque parole, chaque humain, cette présence de notre Seigneur. Voyons tous ces visages qui souffrent, qui sont désespérés ou découragés ; et prenons le temps de communier à cette présence omniprésente dans chaque humain, chaque réalité, chaque événement de notre monde. Prenons aussi conscience de cette vie qui ressemble parfois à celle de l’époque de Noé, une vie marquée, pourrait-on dire, par l’insouciance. « En ces jours-là, avant le déluge, on mangeait et on buvait, on prenait femme et on prenait mari. Jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’à ce que survienne le déluge qui les a tous engloutis. » Avec notre foi et notre espérance en notre Seigneur, nous serons en mesure de surmonter ce déluge qui depuis toujours secoue notre monde, en attendant la colombe de la paix parmi les humains. Wenceslas Mungimur Saint-Laurent-Virton

Homélie du 33ème dimanche du Temps ordinaire année c 13 novembre 2022

Le thème de ce dimanche parle de l’avènement du jour du Seigneur, des événements dans notre monde, de la vigilance, de l’éveil de la foi, et de la persévérance, thèmes dont Jésus entretient ses disciples. La parole de Jésus part de la vision de la beauté du Temple de Jérusalem, dont la construction a duré 46 ans. Les disciples sont en admiration devant la beauté et la splendeur de cette œuvre. On raconte, par exemple, que le mur aujourd’hui appelé ‘mur des lamentations’, a demandé près de dix mille personnes pour sa construction. Le Temple faisait la fierté de tout le peuple d’Israël.

Devant l’admiration des disciples, Jésus annonce, contre toute attente, que ce Temple aura une fin, tout comme le monde aussi est appelé à disparaitre. Tout a une fin, dit-il, et rien n’est immuable ou perpétuel sur cette terre. Donc, pour lui, inutile de s’attacher à ce qui passe et ce qui existe. Il pousse son raisonnement plus loin pour évoquer la réalité précaire et fragile des événements du monde. Le monde connaîtra, prévient-il, des situations diverses, des épisodes heureux et malheureux, des catastrophes, des troubles, des guerres, des épidémies…Mais rien de tout cela n’aura le dernier mot. Face à l’incompréhension et à l’étonnement des disciples, Jésus leur demande de veiller, de prendre garde, de regarder toutes ces situations avec discernement, c’est-à-dire avec l’intelligence de l’Esprit-Saint. Oui, l’Esprit-Saint les aidera à ne pas perdre la tête ni à paniquer, mais à rester clairvoyant au milieu des troubles, des catastrophes ou des persécutions.

La clairvoyance de l’Esprit-Saint les aidera aussi à faire attention aux faux prophètes ou aux prophètes du malheur, celles et ceux qui viendront pour les égarer, pour annoncer n’importe quoi au nom de Dieu, du Christ ou de l’Évangile.

Le deuxième conseil de Jésus consiste à demander à ses disciples de ne pas avoir peur devant tous ces évènements. Lui-même promet son aide et son assistance. Il leur donnera, dit-il, un langage et une sagesse à laquelle les adversaires ne pourront opposer ni résistance, ni contradiction. « C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie. », ajoute-t-il.
Le prophète Malachie, lui, l’exprime en ces termes : « Le Soleil de Justice se lèvera et apportera la guérison dans son rayonnement. »
Saint Paul, s’adressant à celles et ceux qui, parmi les Thessaloniciens, se découragent et ne veulent pas travailler pour attendre la fin, insiste : « Qu’ils travaillent dans le calme pour manger le pain qu’ils auront gagné. »

Aujourd’hui encore, il y a des évènements terribles, des famines, des guerres, des persécutions, des épidémies de toutes sortes, des pandémies, comme celle du Covid, des scandales, des crises politiques, économiques, sociales, morales, relationnelles…qui semblent sonner l’annonce de la fin ou apporter de l’eau au moulin des prophètes du malheur.

Et pourtant, rien de nouveau sous le soleil, ce sont des situations, à quelques différences près, qui durent depuis toujours. Jésus lui-même ne l’a-t-il pas dit : « On portera la main sur vous et l’on vous persécutera ; on vous livrera aux synagogues et aux prisons, on vous fera comparaître devant des rois et des gouverneurs, à cause de mon nom. » Mais, comme il l’a dit, il ne faudra ni paniquer ni désespérer, ni encore chercher des consolations auprès des faux prophètes, ni faire n’importe quoi, mais tenir bon, persévérer et garder confiance. C’est par votre espérance et votre persévérance que vous obtiendrez la vie, dit-il, en ajoutant : « Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu ! » pour signifier combien Dieu est présent auprès de chaque humain.

Oui, le Seigneur est toujours bien là au cœur de nos vies. Aucune épreuve ne peut nous séparer de son amour. Quand tout va mal, il est celui qui nous donne le courage de travailler à la construction d’un monde plus juste et plus fraternel. Il nous invite à demeurer loin des spéculations apocalyptiques, pour vivre pleinement chaque jour qui passe avec sa Parole. Jamais le Seigneur ne nous abandonne.
À l’heure de l’épreuve, il marche à nos côtés, faisons-lui confiance.