Les disciples d’Emmaüs !

Les deux disciples sont là donc en route vers leur village, découragés par un événement qui les dépasse à Jérusalem. Ils regrettent, on dirait, le temps perdu là-bas et ne souhaitent qu’une chose : retrouver leur vie d’avant, leurs vieilles habitudes…Ils sont fermés à toute ouverture, à toute remise en question de leur façon de vivre, fermés aussi à toute la nouveauté apportée par Jésus crucifié à Jérusalem. Peut-être n’ont-ils pas tort… Habités par leurs limites et leurs fragilités, ils restent cantonnés dans les périphéries de ce qu’ils peuvent comprendre et donner. Ce n’est peut-être pas la bonne volonté qui leur a manqué.

Malgré tout cela, Jésus les rejoint et leur montre qu’il n’est jamais absent, mais toujours là avec eux, quoi qu’il arrive. Il est présent pour répondre à leur inquiétude, les apaiser et les rassurer. Il leur donne le temps de s’arrêter, de s’intéresser à lui et de l’écouter quand il les instruit sur les écritures. Ils prennent le temps et lui offrent même l’hospitalité. Leur cœur est bien disposé à écouter et à accueillir la parole de leur hôte. Finalement, leurs yeux aussi s’ouvrent pour reconnaître la vraie identité de leur visiteur : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les écritures ? »

Alors, ils se voient investis d’une mission, celle de retourner sur leurs pas et de repartir jusqu’à Jérusalem, le lieu du départ de leur constat d’échec et de leur découragement. C’est là qu’ils vont retrouver leurs autres compagnons réunis, témoins, eux aussi, d’une autre expérience concernant l’apparition du Maître. Et c’est là qu’ils doivent proclamer la victoire de la résurrection. Il ne s’agit pas d’une parodie, d’un échec…, mais d’une victoire. Le Christ est réellement ressuscité, ils l’ont rencontré. Partis sur le chemin du désespoir, du découragement, ils repartent sur celui de l’espérance et de la victoire.

Cette attitude des disciples nous rejoint dans nos vies quotidiennes, de notre foi et dans nos pratiques. Nous sommes, nous aussi, habités par nos fragilités, notre bonne volonté de bien faire, bien agir, de bien prier, d’être vraiment à la suite du Christ…Seulement, il nous arrive parfois de prétendre tout maîtriser, d’être sûrs de ce que nous faisons, de nous ériger en juges, en donneurs des leçons par rapport à l’une ou l’autre réalité, l’une ou l’autre façon de faire et d’agir.

Aussi, comme les deux disciples, nous sommes aussi ébranlés dans notre comportement quand nous sommes rattrapés par nos limites, nos faiblesses et les épreuves qui peuvent se mettre au travers de notre chemin…Le risque dans tout cela, c’est de nous décourager, de nous renfermer sur nous-mêmes. Le danger, c’est aussi d’oublier de nous poser des vraies questions, d’ouvrir les yeux et les oreilles pour voir et entendre le Christ ressuscité qui est à nos côtés, qui nous invite à célébrer avec lui sa victoire qui est aussi la nôtre et qui nous dit : « Quoi qu’il arrive, rien n’est impossible à Dieu. »

Les moments d’épreuves, comme celui que nous traversons, nous invitent parfois à revisiter en profondeur l’authenticité de notre foi, de notre rencontre avec le Christ ressuscité, de nos pratiques de vie, qu’elles soient amoureuses, amicales, sociales, spirituelles…de notre communion spirituelle. Quelles leçons, par exemple, tirons-nous dans ces situations difficiles que nous traversons ? Ou quelles sont nos tristesses et quelles en sont les raisons ? Pourquoi devons-nous céder à l’ennui au découragement, au lieu de vivre en profondeur le moment présent avec Jésus toujours là près de nous. Mettons-nous en communion spirituelle avec lui, comme conjoints, comme parents, comme enfants, comme chrétiens, comme prêtres ? Demandons-lui cette grâce de le voir présent et agissant dans tous nos lieux de vie et de partage. Wenceslas Mungimur