Méditation à partir de l’évangile de l’aveugle de naissance.

Dans l’évangile de ce dimanche, il est question de la guérison d’un aveugle de naissance, un jour de sabbat. Trois attitudes sont à mettre en parallèle : celle de Jésus envers la personne aveugle, celle de l’aveugle lui-même et celle des pharisiens et des scribes, ‘’docteurs de la loi’’,.
D’abord, nous constatons que Jésus prend l’initiative en l’abordant le premier. Pour le guérir, Jésus utilise un geste simple : il prend de la boue qu’il mélange avec sa salive, avant de la lui appliquer sur les yeux. Comment faut-il entendre ce geste de Jésus ?
Jésus utilise de la boue, matière naturelle, mais pas très indiquée pour guérir la cécité. Il montre qu’il n’y a pas de trucage dans son geste.
Mais il ajoute de sa salive, ce qui change la donne. Son geste est symbolique. Il utilise de la terre pour guérir l’homme de sa cécité physique, mais sa salive en fait un mélange miracle qui guérit l’aveugle de son aveuglement spirituel.
Le chemin du ciel passe par la terre et ouvre les yeux sur une autre réalité.
C’est là toute la symbolique de son geste.

Un second constat, c’est l’évolution du cheminement de l’aveugle, une fois guéri, dans son discernement par rapport à Jésus. Il parle d’abord de ‘’l’homme qu’on appelle Jésus’’, qui lui a ouvert les yeux et envers qui il est reconnaissant, pour en arriver aux termes de « Christ, fils de Dieu », qui a suscité en lui la foi.
Cette foi qui s’installe en lui, grâce à l’espace créé par une guérison intérieure qui va au-delà de son rétablissement physique.  Cette guérison intérieure lui ouvre la voie d’une vraie rencontre avec Jésus-Sauveur et Fils de Dieu. Par Jésus il découvre un Dieu de tendresse et d’amour. Un Dieu de lumière qui désormais va l’éclairer et le guider. Illuminé par cette lumière intérieure et habité par cette présence, il reçoit la force de témoigner en devenant à son tour une lumière qui éclaire les autres.

Malheureusement, sa lumière, comme celle de Jésus d’ailleurs, n’est pas perçue ni reconnue par les pharisiens et les scribes. Pour eux, la préoccupation première, c’est l’observance stricte de la loi. Pour l’application de celle-ci, ils passent leur temps à surveiller les personnes qui la respectent et celles qui ne la respectent pas. Ils ont oublié que le sabbat a été fait pour l’homme ; pour lui donner le temps de se reposer et de se consacrer à son Dieu. Malheureusement, les docteurs de la loi en ont fait un fardeau pour leurs semblables, un prétexte pour asseoir leur hégémonie et asservir les autres.

Ils prétendent savoir, mais ils ne savent pas, connaître mais ils ne connaissent pas, voir mais ils ne voient pas. Ils sont ignorants, avec toutes les conséquences négatives qu’entraîne cette ignorance qui les aveugle. Ils sont tellement imbus d’eux-mêmes qu’ils ne voient pas en Jésus celui qui donne à la loi tout son sens et sa signification. Jésus dénonce une pareille attitude de leur part, ce qui va les énerver, parce qu’ils se sentent ébranlés dans leur autoritarisme, leur sectarisme et leurs fausses certitudes. Aveuglés aussi les disciples, les parents de l’aveugle, la foule qui l’entoure…   

L’aveugle, lui, fait un autre chemin et une autre découverte. Il est naturel, innocent et tellement dans le besoin qu’il ne peut que jubiler, être dans l’action de grâce. C’est lui qui désormais voit clair. Ainsi devient-il témoin qui éclaire, qui guide vers ce Jésus Sauveur qui lui a redonné toute sa dignité humaine et lui a ouvert les yeux de la foi.

Et nous ? Où en sommes-nous ? Sur quoi se basent notre foi, nos pratiques, notre sabbat ? Quel est notre cheminement à nous ? Est-il le fruit d’une rencontre libératrice avec le Sauveur, une rencontre qui fait de nous des témoins authentiques? Sommes-nous des lumières sur le chemin des autres ou sommes-nous un assemblage de traditions héritées du passé ?  Sommes-nous un amalgame de règles et coutumes avec leur stricte observance, accompagnée d’un sentiment de culpabilité et de peur? Si c’est le cas, ne sommes-nous pas atteints par une certaine cécité ou une certaine surdité par rapport à la façon nouvelle d’interpréter la loi prônée par Jésus ?

Puisse ce temps de carême être pour nous ce temps de guérison intérieure et de renouvellement de notre regard et de notre écoute de la Parole de Dieu. ? Il nous appelle à quitter toutes nos interprétations purement formalistes de la loi, de la doctrine, pour rejoindre le comportement et la vérité de Jésus en faisant route avec lui vers sa pâque, qui est aussi la nôtre. 
Wenceslas Mungimur
Saint- Laurent/Virton