Nous ne savons pas si les choses se sont passées telles qu’elles sont relatées dans l’évangile d’aujourd’hui. Le récit de la mort de Lazare n’est pas à prendre au premier degré seulement. En effet, il est plein de symboles. Le premier symbole est celui de la mort, image de toutes les forces du mal qui s’opposent aux forces de vie, prônées par Jésus. Lazare, lui, est notre image à nous tous, confrontés aux forces du mal. La réaction de Marthe et Marie, les deux sœurs de Lazare, est comme la nôtre. Cette réaction est provoquée par la dure loi de la séparation, de l’absence, de la déstabilisation et de la peur de l’avenir. Les deux sœurs réagissent à cet événement, chacune avec leur foi et leur sensibilité. Marthe croit fermement que son frère ressuscitera à la fin des temps. Ce qui ne change rien à la triste situation. Marie se tait ; elle se relie à Jésus et sait qu’il partage sa peine et sa souffrance. Jésus lui-même ne s’en cache pas : Il est ému et touché par cette séparation d’avec son ami. Ceci nous montre bien le côté humain de Jésus, même si par après sa nature et sa mission divines ressortiront et donneront à cet évènement une tout autre dimension. Celle qui va lui permettre d’ouvrir de nouveaux espaces de vie et de manifester jusqu’où va la maîtrise de Dieu sur la vie et la mort.

Au-delà de la mort physique, il existe d’autres morts, sociale, morale, psychique et spirituelle, qui écrasent l’humain et le privent de sa liberté et de sa joie de vivre. Jésus, par sa réaction étonnante et même choquante, veut amener ses amis et leur entourage à prendre conscience de la victoire et de la puissance qu’il possède sur la mort. Avec lui, la mort n’est plus une fin sans issue, elle fait partie de la vie et devient une étape de l’existence et un passage dans la vie de l’au-delà. Les forces de mort n’arrivent plus à écraser l’humain ni à avoir le dernier mot. Celui-ci se trouve du côté de Jésus et de son père qui possèdent cette puissance et cette maîtrise.

Que ce temps de carême nous aide à prendre conscience de toutes ces morts qui nous privent de la joie de vivre, qui nous paralysent et nous enferment dans les tombeaux de nos égoïsmes, de nos préjugés et critiques négatives, de nos manques de confiance en nous-mêmes et dans les autres. Celles qui nous divisent et nous plongent dans les ténèbres, dans la haine ou la vengeance et qui nous enchainent dans la morosité de nos vies et dans celles de ceux et celles qui nous entourent. Le geste de Jésus vis-à-vis de Lazare est celui qu’il réalise avec chacun et chacune d’entre nous, en ouvrant la voie vers la victoire de la vie sur toutes les morts. Jésus, par la victoire de sa résurrection, vient aussi ouvrir nos tombeaux et nous délier de nos chaînes de mort pour nous rendre libres et participants de cette victoire.

Nous commençons, nous aussi, à ressusciter lorsque nous suivons Jésus dans notre vie de tous les jours. La vie éternelle commence dès maintenant, dans notre façon de vivre et d’aimer à la suite de Jésus. Le plus profond désir de Jésus est de nous partager cette vie éternelle. À sa suite et à l’exemple de Marthe et de sa sœur Marie, nous sommes ainsi invités à professer notre foi. Non pas une foi basée sur les opinions ou les idées, mais une foi en la personne de Jésus, présent en nous, au cœur de notre vie. Wenceslas Mungimur Saint-Laurent/Virton