Ce troisième dimanche de carême nous donne l’occasion de relire le récit des marchands du Temple chassés par Jésus. Nous connaissons bien ce récit et nous connaissons aussi certains abus d’interprétations liées à celui-ci. Celles-ci nous conduisent parfois à des comportements en contradiction avec la douceur de la Parole et avec l’amour de Dieu.

Les Juifs respectaient le Temple comme la vraie demeure de Dieu sur terre, mais petit à petit, d’autres coutumes ont pris naissance et n’étaient plus du tout liées à celles de cette tradition respectable. Oui, peu à peu, il s’est avéré qu’au lieu d’être la maison de Dieu, le Temple a fini par devenir la maison des humains avec tout ce que cela pouvait comporter comme objectifs propres aux intérêts humains et non au culte rendu à Dieu.

Disons que le Temple s’est transformé dans son objectif initial à cause d’une mauvaise interprétation du rôle de celui-ci.
La vision sacrée liée au Temple s’est transformée au profit du commerce.

De plus le Temple a fini par devenir aussi, si on peut dire, un lieu de discrimination où l’accès n’était pas accordé à tout le monde. Les catéchumènes, par exemple, ne pouvaient rester qu’au niveau du parvis sans avoir accès à l’intérieur. Et c’est justement sur le parvis que se faisaient tous les commerces. Une façon, dirait-on, d’éloigner les catéchumènes ou les non ayants droit du lieu du culte ; or ils n’avaient que cet espace là pour s’approcher et entrer dans le Temple du Seigneur.

Au-delà d’une telle attitude qui n’est que la pointe de l’iceberg de tout le système mis en place et témoignant de la méconnaissance de Dieu et de la gratuité de son amour, le geste de Jésus comporte un double message.

D’abord, il demande aux gens de ne pas faire de leur religion une religion de marchandage, de profit ou de mérites, comme c’est encore souvent le cas dans nos pratiques. Parce qu’une religion de mérites n’est pas la religion de Jésus ni celle de Dieu. En Jésus, tout est grâce, tout est gratuit, tout est don de Dieu, sans aucune demande de compensation par un mérite de notre part. Nous n’avons qu’à recevoir et accueillir ces dons et savoir dire merci.

Le deuxième message, c’est celui que Saint Paul nous rappelle : « Vos corps sont des temples de Dieu ». Ici nous est évoqué le respect profond que nous devons avoir vis-à-vis de notre propre personne, notre propre corps, comme pour toute personne humaine, femme, homme, enfant, croyant, non croyant, baptisé ou non baptisé. Dieu n’a pas à être récupéré pour être enfermé dans un temple ou dans une église, aussi belle, aussi somptueuse soit-elle !

Dieu est d’abord et avant tout en nous et nous sommes son vrai temple. Quand nous sommes deux ou trois réunis en son nom, il est au milieu de nous, comme le Christ nous l’a promis.
Jésus lui-même, et il le dit aussi, est le temple de Dieu. C’est à lui-même qu’il fait allusion, quand il parle de reconstruire le temple en trois jours. Ce que ses auditeurs ne comprennent pas et qui ne fera que les exaspérer.

Tant que Dieu n’est pas rencontré dans une relation d’intimité et de communion profonde, la foi en lui, en son existence, en sa loi devient absurde, folie et de l’ordre de la chimère. C’est alors l’homme qui prend sa place et remplit le vide par des préceptes humains. Mais quand l’homme rencontre, écoute et se laisse guider par Dieu, il découvre la richesse et les bienfaits de la loi de Dieu pour les humains. Une loi qui n’est qu’amour et qui a pour seul souci le bonheur de l’homme. A partir de là, tout trouve son sens par rapport à Dieu, à son envoyé Jésus et à sa loi. Toute vie devient alors une présence de Dieu et par conséquent son temple.

Que ce temps de carême nous donne la possibilité de nous ressourcer en Dieu, présent dans le temple que nous sommes, afin de ne pas perdre notre temps à le chercher ailleurs, dans mille et un préceptes ou règles …Ces prescriptions nous accablent au lieu de nous aider à jouir de notre vraie liberté d’enfants de Dieu, elles nous culpabilisent et nous remplissent de remords qui nous font passer à côté de la mission essentielle qui nous est confiée, à savoir aimer Dieu et nous aimer les uns les autres…

Wenceslas Mungimur, Saint-Laurent Virton