Dans notre marche spirituelle vers Pâques, par la voie de la conversion, du partage et de la prière, nous avons compris qu’il fallait vivre avec Jésus une expérience du désert pour être mis face à nous-mêmes, aux autres et à Dieu. Aujourd’hui, notre marche continue : une marche de confiance qui nous demande de tout quitter et de partir avec Dieu vers l’inconnu,. Comment est-ce possible ? Comment oser faire confiance à quelqu’un que l’on ne connaît pas bien ? Comment oser tout quitter pour aller vers l’inconnu ? Il s’agit là d’un mystère et seule la foi, issue d’une rencontre personnelle avec Dieu, peut essayer d’apporter une réponse. Ce mystère, cette aventure sont pourtant vécus par beaucoup de croyants. Des croyants d’hier comme d’aujourd’hui.

Le témoignage d’Abraham, dans la première lecture de ce dimanche, est interpellant ! À la demande du Seigneur son Dieu, il exprime une totale confiance et quitte tout. Le récit dit : « Abram (le nom qu’il avait avant de rencontrer le Seigneur) s’en alla, comme le Seigneur le lui avait dit. » Et pourtant, cet Abram-là n’était pas gâté par la vie et avait tout pour douter de ce Dieu et lui opposer une résistance Il est âgé et sans descendance. Sa femme, elle aussi au crépuscule de la vie, dont il est dit qu’elle était stérile. Cette situation pouvait faire naître chez eux un sentiment de révolte ou d’aigreur, quand on connaît la manière dont on considérait leur condition dans leur culture et l’opprobre public engendré par le fait de ne pas avoir de descendance. Mais non ! Abram ose un oui qui va le transformer et changer le cours de sa vie, individuelle, familiale et sociale. Un OUI qui lui ouvrira les portes des bénédictions de son Dieu, pour lui et toute sa descendance ; et également pour ses compatriotes.

Il fallait ainsi oser pour comprendre qu’au-delà de l’impression négative que l’on peut avoir de soi-même, de son entourage, des autres et de Dieu, il y a du positif, des bénédictions, de la lumière qui nous attendent. C’est le conseil que Paul donne à son disciple Timothée, qui va être confronté à des résistances par rapport à l’annonce de l’Évangile. « Prends ta part des souffrances liées à l’annonce de l’Évangile. Car Dieu nous a sauvés, il nous a appelés à une vocation sainte, non pas à cause de nos propres actes, mais à cause de son projet à lui et de sa grâce. » Autrement dit, tiens bon : tu es dans le bon !

C’est également ce que Jésus vit avec ses disciples, en particulier Pierre, Jacques et Jean, sur la montagne de la transfiguration. Les trois ont des ambitions autres que celles de Dieu, une autre conception de Dieu, de Jésus, de sa mission et de celle qui les attend. Ils feront, eux aussi, une rencontre qui va les bouleverser et les transformer. Par Jésus, ils font l’expérience d’un Dieu autre que celui qu’ils prétendent connaître, à la hauteur de leurs certitudes et de leurs ambitions humaines. Ils font l’expérience d’un Jésus Sauveur, un Fils de Dieu, lumière qui donne sens à leur vie, les éclaire, les libère et les sauve.

Dire ‘oui’ à Jésus et dire ‘oui’ à son projet d’amour, c’est être appelé à partager sa gloire, c’est, comme Abraham, donner accès à une source intarissable de bénédictions. Mais c’est aussi savoir que notre marche vers Dieu, vers Pâques, pourra être parsemée d’embûches, de morts apparentes ; mais au bout se trouve la victoire, la résurrection. Il nous faut oser la foi, oser la confiance. Des facilités, comme celles que Pierre souhaite dans son extase devant la transfiguration, comme nos intuitions sur des certitudes que nous voulons imposer aux autres, ne sont pas toujours de nature à nous faire grandir sur ce chemin vers lequel nous engage le Christ. Il nous faut une vraie rencontre avec ce Dieu de Jésus, nous laisser éclairer par sa lumière pour mieux comprendre le respect, l’amour qu’il a vis-à-vis de tout humain ici sur terre. Ainsi nous éviterons tout comportement méprisant ou d’intolérance vis-à-vis de nos frères et sœurs migrants et réfugiés chez nous, au nom parfois d’un certain Dieu ou de certaines racines chrétiennes.